Bosal, pierre angulaire de l'équitation Californienne

Comment aborder l'utilisation d'un bosal sans parler de l'équitation qui l'a développée ? Petit condensé :

En essayant de rester simple, il y a deux courants principaux dans l'équitation western : la branche Texane, devenue maintenant pratiquement académique et pratiquée par 99% des cavaliers western, et la branche Californienne. C'est cette dernière qui nous intéresse aujourd'hui.

Nous passerons les explications historiques et géo-politique expliquant le développement parallèle des deux branches, mais si l'on veut prendre des raccourcis, nous oserons dire que l'équitation Texane est simple, efficace et rapide, là où la branche Californienne est raffinée, exigeante et lente. Le concept de "La Mañana" est ancré dans la culture : "Si on n'a pas le temps aujourd'hui, on verra demain matin". Les deux ont leurs qualités ... et leurs défauts.

L'équitation Californienne est un rejeton de l'équitation Espagnole Vaquera, importée directement des Conquistadors et adaptée au terrain et troupeau. Avec le temps, elle restera plus traditionnelle autour des Missions Californiennes, et évoluera vers un hybride purement américain dans la région du Great Basin : les Buckaroos (américanisation de la prononciation Vaqueros). Nous y reviendrons plus tard.

L'équitation Californienne repose sur un système évolutif du dressage du cheval, en trois étapes successives : le Hackamore, le Two-Reins, la Bride. L'évolution Buckaroo inclus le mors de filet en toute première étape.

Le Hackamore :

Comme nous l'avons déjà vu, le terme désigne les plus gros diamètres de bosals. Les Californiens utilisaient le Hackamore en partie pour éviter de toucher à la bouche du jeune cheval, alors en train de développer sa dentition. Rappelez-vous, les Californiens sont moins pressés que les Texans : le débourrage à lieu vers 4 ans minimum et le dressage vers la Bride s'étend jusqu'à 8-10 ans et au delà.

Le jeune cheval sera donc débourré en Hackamore. Ainsi la surface de contact et le poids rendront les signaux clairs et sans ambiguïtés, pour un apprentissage des plus simples. Au fur et à mesure de son dressage, le bosal sera affiné pour encourager subtilité et légèreté chez le cheval.

Le Two-Reins :

Credits Clarisse Gilbert

Après plusieurs années en Hackamore, le cheval est maintenant réceptif aux plus légers signaux de son cavalier. Il est à

l'aise et connait son job. Il est temps d'introduire le mors de Bride.

Mais pas n'importe comment et toujours sans précipitation ! On laissera le temps au cheval de découvrir et accepter le mors, sans y toucher, sans même y attacher les rênes : il doit d'abord apprendre à le porter, à se déplacer avec, à travailler avec.

Puis progressivement, le cavalier prend en main deux paires de rênes (Two-Reins) : les mecates d'un bosal fin, et les rênes de Romal de la Bride. L'apprentissage passera par un fin jeu d'utilisation des rênes et l'ajustement de leur longueur, pour initier une action avant l'autre, dans un même mouvement : d'abord uniquement le bosal, l'action sur la bride arrivant seulement après. Au fur et à mesure, le cavalier raccourcit les rênes de Romal, allonge les mecates du bosal, jusqu'à ce que les deux agissent de concert, puis enfin, que l'action initiale se ressente sur la bride, avec l'appui du bosal en second lieu.

Le cheval a alors tout le temps de "traduire" les signaux du bosal, qu'il connait parfaitement, vers les signaux de la Bride, qu'il est en train d'apprendre. Si il ne répond pas, faute de compréhension ou d'attention, à un signal de la Bride, la pression ne se fera pas plus forte pour autant : c'est le bosal qui entrera en action, et viendra confirmer la demande.

La Bride :

Encore quelques années s'écoulent, et enfin le cheval peut être monter en Bride seule, "Straight in the Bridle". Bien sur, comme durant tout le dressage du cheval, il n'y aucune honte à revenir au stade précédent quand les choses chauffent un peu autour du bétail, par exemple, ou si une incompréhension se développe. C'est toute l'ingéniosité du système des étapes.

Spade Bit available at Three Forks Saddlery

Je ferais peut-être un article spécialement sur la Bride Californienne, mais je tiens à souligner ici la différence avec les brides courantes :

Tout le système Californien repose sur des signaux et non sur des contraintes. La Bride Californienne est impressionnante d'apparence, le Spade Bit en étant le figure de proue. Ce type de mors pourrait être dévastateur si il était utilisé autrement qu'après ce long processus d'apprentissage.

Mais le Spade Bit est construit sur un savant mélange d'équilibre et amplification de la subtilité des signaux. Ce n'est pas, CE N'EST PAS, un mors à levier. On ne l'utilise pas en tirant dessus.

La particularité Buckaroo :

Ce que je viens de raconter est encore valable dans la tradition Californienne. Mais, soyons réaliste : mis à part quelques afficionados, quelques passionnés qui se réservent encore un ou deux chevaux à préparer selon la tradition, qui a encore le temps, l'argent et le savoir pour procéder systématiquement de la sorte ?

Est donc né un hybride purement américain : les Buckaroos. Ils utilisent le même processus ... mais en version accélérée. Les étapes sont plus rapides, les années d'apprentissage se transforment en mois, et le système se doit plus tolérant aux erreurs et raccourcis. Dans ce but, on inclut une étape préparatoire, un garde-fou : le snaffle bit ou mors de filet à simple brisure.

L'embouchure basique est beaucoup plus tolérante aux erreurs que le bosal, et le cavalier brulant un peu les étapes a la possibilité de rétrograder en cas de problèmes. Le cheval est débourré et connait déjà bien son job avant de passer au Hackamore, et le préparer à la Bride. De même, un peu de temps est alors gagné au moment de passer au mors, la sensation déjà acquise d'un truc dans la bouche, et grosso-modo comment y répondre - ce que le cheval Californien n'a pas eu loisir, vu que la première chose qu'il a dans la bouche est un mors de bride.

Vu que j'utilise le terme "Signal" à tour de bras, je vais vous préparer un petit article especial : Le Grand Bluff